La réforme des universités se poursuit. Les enseignants ont renvoyé la copie du gouvernement avec mention "Rien compris. A reprendre". Le décret si contesté sur le statut des enseignants - chercheurs sera donc repris à zéro. Mais peut on espérer quelque chose de vraiment différent? Je reste sceptique.
La réforme qui occupe tellement les esprits est une réforme administrative. Sa préoccupation principale est d'optimiser la gestion des ressources dont dispose aujourd'hui l'université. La nouvelle version des textes sera encore une réponse comptable face à un malaise qui est à mon avis de tout autre nature.
L'esprit même de l'université française, sa vocation se retrouvent remis en cause par les évolutions récentes de la société. Le modèle historique d'une université est celui d'un lieu où les scientifiques travaillent librement sur leurs recherches et où ils enseignent devant les disciples venus en quête des connaissances. Un professeur de l'université transmet à travers ses cours le fruit de ses recherches.
Ce temple de savoir est maintenant menacé d'être englouti par la vague des générations nouvelles. Plus de 80% de lycéens obtiennent leur bac et viennent frapper aux portes de l'enseignement supérieur dans l'espoir de trouver une voie vers la grande vie. Et ce sont les universités qui en accueillent la plus grande partie. Sont elles prêtes à faire face? Sont elles capables de répondre efficacement aux nouvelles demandes? Beaucoup de ces nouveaux étudiants sont à la recherche d'une formation professionnelle, les préparant au travail dans une entreprise. Est ce que cette demande est compatible avec les principes d'enseignement universitaire, tournés vers la formation à la recherche? La plupart de ces étudiants ont une idée très vague de ce qu'ils vont pourvoir faire plus tard. Est ce que l'université est capable de les orienter. Est ce que c'est son rôle?
Le principe du libre accès à la connaissance est la cause de l'absence de concours à l'entrée de l'université. Il suffit de s'inscrire pour étudier la discipline de son choix. Cela attire beaucoup de ces jeunes gens qui espèrent d'y voir plus clair, une fois à la fac. Mais sont ils conscients que la véritable sélection se fera à la fin de la première année, quand il ne restera qu'une moitié à peine de la promo initiale? Les faibles taux de réussite à la première année de fac sont pour moi le signe le plus flagrant des contradictions du système. Pourquoi 80% d'une génération obtiennent le bac et un an plus tard ils ne sont que 50% à réussir? Il y a pour moi du mensonge (par omission) quand on dit qu'il n'y a pas de sélection à l'université. Et ce mensonge fait perdre à beaucoup d'étudiants un an, voire plus avec tout ce que cela peut avoir comme conséquences: coûts élevés pour la famille, perte de confiance en soi, perte de motivation pour poursuivre ses études, etc.
Est ce la faute de l'université seule? Je pense que c'est le problème de l'enseignement supérieur en général. Le problème est qu'aujourd'hui on essaie d'arranger les difficultés de l'université par les solutions administratives, par un comptage d'heures d'enseignement des chercheurs. Tandis que c'est l'offre d'enseignement supérieur dans sa globalité qui n'est pas adaptée aux jeunes générations actuelles avec 80% de bacheliers.
Le principe du libre accès au savoir "les connaissances sont là pour ceux qui veulent venir les chercher" est important et il faut le maintenir. Mais il ne convient pas à tout le monde. Il est donc nécessaire de trouver autre chose pour que l'université retrouve son véritable rôle de gardienne des savoirs dans un système d'enseignement supérieur qui laisse moins de monde sur les bords.
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