samedi 16 janvier 2010

La course à l'infini


"Il est un concept qui corrompt et dérègle tous les autres. Je ne parle pas du Mal, dont l'empire est circonscrit à l'éthique; je parle de l'infini."
J.L. Borges, (1939).


Au Vème siècle avant notre ère le philosophe grec Zénon d'Elée énonçait quelques paradoxes mettant en évidence les contradictions profondes engendrées par les conceptions de l'infini et de l'infiniment petit proposées par les écoles de pensée dominantes de son époque. L'un d'eux est le célèbre paradoxe d'Achille et de la Tortue. Voici l'histoire.

La Tortue vient voir Achille, le grand athlète, et lui propose de disputer une course de 100 mètres avec elle. Achille, sûr de sa victoire, mais beau joueur, accorde une avance de 50 mètres à la malheureuse. Une fois le départ donné, les deux se mettent en route, chacun selon ses moyens. Mais au moment où Achille atteint le milieu de la distance, où la tortue se trouvait au départ, elle a avancé et se trouve devant lui. En continuant ainsi, à chaque fois qu'Achille atteindra la position occupée par la tortue à un instant donné, cette dernière, avancera un peu et sera toujours devant lui. Il est donc impossible à un athlète comme Achille de rattraper une pauvre bête comme la Tortue?

Bien sûr, Zénon était conscient que n'importe qui, sans être Achille, pouvait gagner une course contre une tortue. Et pourtant, son raisonnement construit à partir de l'hypothèse que le temps était infiniment divisible le menait à une contradiction. Pourquoi? Qu'est ce qui manquait à la conception mathématique grecque de cette époque pour pouvoir éliminer le paradoxe?

Supposons pour simplifier qu'Achille court 2 fois plus vite que la Tortue. Combien de temps il lui faut pour rattraper la Tortue si l'on suit le raisonnement de Zénon?

Il lui faudra un temps T pour parcourir les premiers 50 mètres afin d'atteindre la position initiale de la Tortue. Mais alors la Tortue avancera de 25 mètres car elle court deux fois moins vite. Il faudra donc à Achille le temps T/2 pour atteindre la nouvelle position de la Tortue. Si on poursuit ainsi le raisonnement de Zénon, le temps que va courir Achille avant de rattraper la Tortue devrait être

T+T/2+T/4+T/8+T/16+.....T/2^k+....

Le problème c'est que cette somme n'a pas de fin. Elle est infinie. Et c'est là, la clé du mystère! Si les mathématiciens grecques contemporains de Zénon avaient une certaine idée de l'infini et utilisaient cette notion dans les raisonnements, il était inconcevable pour eux qu'une somme infinie de quantités positives puisse avoir une valeur finie!

Il a fallu plusieurs siècles et les contributions des plus grands mathématiciens du monde entier pour pourvoir lever ce paradoxe définitivement.

Il a fallu tout d'abord concevoir le zéro en tant que véritable nombre (vers le VII-ème siècle, en Inde)! Il a fallu des siècles de développement de l'algèbre et de la géométrie au Moyen Orient (VIII-ème-XVII-ème). Il a fallu que Europe se réveille enfin de son long sommeil moyenâgeux et redécouvre lentement les sciences, la philosophie et, entre les deux, les mathématiques et que les plus grands penseurs européens de la renaissance s'attaquent enfin avec ferveur aux problèmes vieux de plusieurs centaines d'années.

C'est donc là, en Europe et surtout en France, autour de XVII-XVIII ème siècles que se termine cette course paradoxale, la course vers l'infini. Après une lente et laborieuse libération de la notion de l'infini de ses aspects métaphysiques et irrationnels. Après la conception de la notion de limite et avec elle, de la convergence. Cauchy, Leibniz, Lagrange, Fermat, Newton, Ricatti, Fermat, Wallis, Pascal, Fourier, Euler et de nombreux autres grands esprits ont contribué à ce développement. Plus tard, au XIXème, le mathématicien allemand Georg Cantor [1845-1918] développera la théorie des ensembles, posant ainsi les fondements des mathématiques modernes et, en autres, de la conception moderne de l'infini.

Mais, est elle vraiment finie, cette course? Pas vraiment. Elle se répète indéfiniment à chaque fois que des jeunes esprits se retrouvent confrontés, à l'école, à cette notion. Car la conception de l'infini n'a, à mon avis, rien d'inné, rien d'intuitif. Bien au contraire, elle révèle en chacun de nous les paradoxes les plus profonds, les plus inconscients, les plus troublants de notre perception du monde qui nous entoure. Comprendre la notion mathématique de l'infini est justement l'excellente occasion à apprendre à faire la différence entre la perception et la conception rationnelle des choses, apprendre la véritable rigueur de pensée.

C'est peut être l'occasion de découvrir à quoi servent vraiement les mathématiques?


Sources: Une histoire des mathématiques de Amy Dahan-Dalmédico , Jeanne Peiffer

Théorie des distributions: rien de plus facile!


Je m'inquiétais dans un récent billet des difficultés que peuvent éprouver mes élèves devant une théorie réputée abstraite. Mais ce matin, je me suis rendue compte, en lisant "Le Canard enchaîné" que je me suis fait du souci pour rien.
Dans un article consacré à la suppression de la taxe professionnelle Le Canard analyse le nouveau dispositif de taxation qui la remplacera. Il cite une explication fort éclairante sur le mode de calcul de cette nouvelle taxe, appelée "Contribution économique territoriale", donnée dans "La Tribune" du 15/12. Je recopie ici, c'est édifiant:
"A partir de 152 500 euros de chiffre d'affaires les entreprises se verront appliquer un taux de 1.5% sur leur valeur ajoutée et bénéficieront simultanément d'un dégrèvement calculé comme la différence entre le montant dû en application du taux de 1.5% et le montant résultant de l'application du barème progressif. "
A coté de cela la théorie des distributions parait d'une simplicité enfantine!

La foire aux bonus


On parle beaucoup en ce moment des bonus que les différentes banques dans monde entier attribuent à leur braves traders pour leurs bons et loyaux services. Personnellement, je ne suis pas opposée aux bonus. Après tout, si quelqu'un a contribué de façon significative à la progression de la banque, à l'amélioration de sa santé économique, pourquoi ne pas le récompenser?
Mais alors, cette année, il devrait y avoir des bonus pour les états. Les traders ont des primes en fonction des millions qu'ils rapportent dans les coffres des banques? Mais cette année de nombreux états ont mis la main dans la poche (de leurs contribuables (sic)) pour mettre de jolies sommes dans ces mêmes coffres, désespérément vides. Grâce à cet argent les banques ont évité le pire, la banqueroute.

Ils sont où, les bonus?

samedi 9 janvier 2010

Paradoxe

L'enseignement classique des mathématiques, tel qu'il est fait au colège et lycée, ainsi que le plus souvent à l'Université et dans les classes préparatoires, porte en lui la graine d'une contradiction difficile à résoudre.

On enseigne les mathématiques à l'aide d'exercices et de problèmes dont on connaît la solution et la méthode de résolution, alors que ces mêmes mathématiques devraient servir à résoudre les problèmes dont personne ne connaît encore la solution ni la méthode d'approche.

Ainsi, dès le plus jeune age, on donne à nos élèves une idée complètement fausse des mathématiques, une idée d'un catalogue de problèmes et de méthodes de calcul, plus ou moins abstraits, qu'il faut apprendre pour passer les examens.

Alors que les mathématiques sont une science où on invente, on crée, on se débrouille, on bricole, on retourne les idées sens dessous-dessus et le tout dans la rigueur absolue de la raison. Alors qu'il n'y a qu'une seule et unique méthode en mathématiques, celle de la logique. Le reste est la liberté d'imaginer.

Que faire?

lundi 4 janvier 2010

Bonne annnée

En cette période très particulière qui suit les fêtes de fin d'année il est de tradition de faire part de ses voeux (toujours les meilleurs et les plus sincères) pour la nouvelle année qui commence. A l'époque où le mail fait de la concurrence déloyale à la bonne vieille Poste, j'aime encore écrire et recevoir des cartes postales, des vraies. J'aime ce moment bien particulier, où l'on s'apprête à poser sur le joli carton, choisi avec soin, quelques mots simples à l'intention d'une personne proche, un ami, un parent. J'aime voir la ligne bleue laissée par la plume sur le papier former des lettres, des mots, des phrases. C'est un bref moment où l'on se rapproche, par la pensée, d'un être cher. C'est l'instant où les mots de circonstance, délavés et décolorés par l'usage massif dans les " voeux officiels" de tout genre, retrouvent leur chaleur et leur sens. J'aime coller un joli timbre sur l'enveloppe et aller la glisser dans la boîte postale en pensant encore une fois au chemin que ma carte va parcourir avant d'atteindre son destinataire.

Mais, il faut bien vivre avec son époque! Cette année, pour la première fois, grâce à ce blog, j'ai l'occasion de lancer un "bonne année!" dans le vaste océan de l'Internet.

A tous ceux qui le liront un jour, qui visiteront un jour ces pages, je souhaite une très bonne année 2010, pleine de belles idées qui vous feront rêver, de meilleurs découvertes qui réaliseront vos rêves, des rencontres étonnantes, et surtout, de la paix!

Bonne année!