On peut entendre ou lire, ça et là, des phrases comme « … ces climato-sceptiques qui ne croient pas au réchauffement climatique… ». Eh bien, je n’y crois pas, moi.
Parce que je n’ai pas à y croire. La climatologie n’est pas une religion, c’est une science. Et la question n’est pas de croire ou ne pas croire. La question est de savoir ou ne pas savoir. La climatologie n’est pas non plus une démocratie où on se met d'accord pour décider ce qui sera la vérité. Le terme « consensus scientifique sur le climat » n’a à mes yeux aucun sens. Le mot « consensus » désigne une décision ou un accord général, sur une décision admise par une large majorité. C’est un terme du monde politique. En science, même si un grand nombre de scientifiques pensent qu'une thèse donnée est très probablement vraie, elle restera avec un statut de conjecture tant qu'elle n'est pas prouvée de manière irréfutable. Il l'histoire de la science en connaît plein, des conjectures qui ont duré des siècles.
Si consensus sur le climat il y a, il est surtout politique, pas scientifique. Et c’est normal. A l’état des connaissances scientifiques actuelles sur l’évolution du climat il est normal que les pays débattent et prennent des décisions communes. Ces décisions sont le fruit de longues négociations qui sont loin de prendre en compte seulement les arguments purement scientifiques. Mais pourquoi alors il faut absolument qu’on nous présente ces décisions comme un « consensus scientifique » ? Parce que ça donne à la chose un semblant de caractère objectif : « puisque les scientifiques l’ont dit !.. » et masque les habituels calculs d’épicier et les rapports de force entre les lobbyings pro-ceci ou anti-cela.
Le danger d’une telle « étiquette scientifique » est qu’elle fausse totalement la perception du problème par l’opinion publique, tue le débat démocratique et nuit gravement au développement scientifique.
A partir du moment qu’on a déclaré haut et fort qu’il y a « consensus scientifique » sur les causes du réchauffement climatique et sur les mesures à prendre, toute recherche scientifique qui pose le problème autrement, qui cherche d’autres explications possibles, qui explore d’autres aspects du phénomène, est regardée d’un mauvais œil, avec méfiance et considérée comme inutile puisqu’on sait déjà tout : la cause du réchauffement est le CO2. Et il va y avoir des journalistes et profs de philo pour vous expliquer que
«
Non, les climato-sceptiques n’ont pas un « rôle important à jouer dans le débat », car il n’y a plus de débat dans la communauté scientifique sur la question du réchauffement climatique. …. »
et traiter tous ceux qui osent douter de la thèse officielle de « négationnistes ». Or, ce n’est pas la certitude qui fait progresser la connaissance mais le doute, justement. Chasser ceux qui doutent c’est tuer la jeune science climatologique dans son berceau.
L’opinion publique occidentale, dressée à faire confiance à la science qu’elle ne comprend pas, accueille le discours avec bienveillance. Ca n’a pas l’air sorcier, tout le monde peut comprendre : la planète se réchauffe, c’est un peu (beaucoup) notre faute, mais on peut encore réparer : il faut réduire les émissions de gaz à effet de serre. Et c’est justement là qu’intervient la petite phrase magique qui endort votre propre esprit critique et fait de vous un parfait volontaire obéissant : « puisque les scientifiques l’ont dit ». Le phénomène n’est pas nouveau, on connaît l’effet de l’autorité de la science depuis les expériences de Milgram.
Imaginez que vous êtes face à un tsunami qui vous fonce dessus. Vous le percevez au loin, à l’horizon. Vos dirigeants de tout bord et surtout les gentils écologistes, vous disent : « Surtout ne bougez pas ! ». Parce que les scientifiques pensent que le tsunami a été provoqué par les vibrations des pas de tous les humains de la planète. On est trop nombreux et on marche trop ! Alors tout ce qu’il y a à faire c’est de ne pas marcher ou le faire le moins possible. Tous ensemble, pour sauver la planète, ne bougeons pas ! Vous faites quoi ?
Alors comme ça vous prenez le café à l'ENSTA: (au messe des officiers).
RépondreSupprimerDonc pour garder votre poste de prof vous édulcorez. Le 13 juillet 2011(date de votre article) l'inquiétant n'est pas le tsunami pourtant terrifiant mais c'est Fukushima .
N'avez-vous pas remarqué que vos élèves de l'ENSTA n'avaient rien appris sur la radioactivité en classes préparatoire.Alors que les débouchés de l'ENSTA sont très souvent liés au nucléaire.L'ignorance est la qualité requise pour démonter une centrale vieillissante,ou au pire pour gérer un fukushima/Rhin...
J'ai voulu bouger. Je me suis retrouvé dans une manif anti-nucléaire: tout au plus 80 personnes!!!(En France ça ne bouge pas, reste à comprendre pourquoi)
Cet article n'avait rien à voir avec le nucléaire ni avec l'ENSTA d'ailleurs (je ne prends pas mon café au messe et je n'enseigne pas à l'ENSTA). Si j'ai parlé d'un tsunami c'était sans aucun rapport avec celui qui a provoqué la catastrophe de Fukushima. C'était une métaphore pour illustrer un certain type de discours sur le réchauffement climatique qui consiste à concentrer tout l'attention sur les emissions de CO2, sans évoquer d'autres mesures, tout aussi urgentes: celles qui permettraient de s'adapter aux changement déjà en cours.
RépondreSupprimerEt pourquoi voulez vous que les élèves apprennent le nucléaire en classes préparatoires? C'est pas fait pour. En classes prépa on reçoit des enseignements très généraux, des bases théoriques, en maths et en physique. Et il en faut, des bases pour pouvoir aborder la physique nucléaire sérieusement. C'est en école d'ingénieur ou à l'Université qu'on peut ensuite s'orienter vers les métiers du nucléaire et alors on apprend les choses en profondeur.
Enfin, la question du nucléaire est tout aussi complexe et malheureusement tout aussi politisée que celle du climat. Personnellement, je n'irais pas dans un manif car à mon avis ce n'est pas un endroit idéal pour un vrai débat. C'est bien beau d'urler des slogans anti-nucléaires, mais pour moi ce qui est plus important c'est pourquoi. Quels vrais arguments pour ou contre le nucléaire? La peur n'est pas un argument valable à mes yeux. Et si on souhaite renoncer au nucléaire, par quoi le remplacer? L'Allemagne qui a annoncé la fermeture de ses centrales les remplace par celles à charbon. Et que faire du CO2 alors? Il faut savoir! Il ne faut pas oublier que ce sont justement des lobbis du nucléaire qui soutiennent largement la GIEC dans sa lutte contre les émissions des gaz à effet de serre.
Tout ça pour dire que la question de source d'énergie n'est pas simple à résoudre et il est dommage de ne pas voir de véritable débat en France sur le sujet.
Merci de votre longue réponse mais:je vous cite:
RépondreSupprimer"jeudi 21 juillet 2011 De la langue de bois "scientifiquement correcte"?En prenant mon café hier à l'ENSTA où je travaille en ce moment"
et votre blog c'est "pensées d'un prof"
Donc si votre travail à l'ENSTA n'était pas celui d'un prof vous étiez hors sujet dans votre blog
Que peut faire un prof en exercice sinon pratiquer la langue de bois. Et c'est ce que vous faites .
Le mot "prof" dans le titre de ce blog ne signifie pas un poste, ni une case dans la grille des grades de fonctionnaires, ni une montagne fantastique de privilèges que l'imaginaire collectif attribue (injustement) à ce mot. "Prof" est un métier, c'est mon métier (ou l'un de mes métiers si on veut).
RépondreSupprimerA l'ENSTA, je participe, depuis un an seulement, à un projet de recherche. Je n'y enseigne donc pas. J'ai enseigné pendant de nombreuses années dans une autre école d'ingénieur, où je suis intervenue encore récemment pour quelques rares cours qui me tiennent à coeur.
Vous faites des déductions un peu trop rapides. Comme si, à partir des éléments que vous citez, il était évident que je suis prof "en poste" à l'ENSTA et à la solde de l'armée, en plus, puisque je bois leur café ;-)
C'est de ce genre d'évidences faciles que l'on devrait de méfier le plus, n'est ce pas?